Je repose mon verre quand on sonne à la porte.
« Henri, mon vieux, dit le commissaire en entrant, je suis inquiet pour toi. » Il regarde mon verre avec insistance.
« J’ai un travail à finir commissaire, réponds-je.
– Écoute, j’ai déjà dû te retirer ton arme et ta plaque, tu ne peux pas continuer comme ça, tu as besoin d’aide. »
Deux infirmiers entrent dans la pièce, je les regarde désespéré.
« C’est pour ton bien Henri, continue le commissaire.
– Mais, et le meurtrier ? Je suis proche, protesté-je.
– Nous nous en occuperons, repose-toi. » Dit-il las pendant que les infirmiers me traînent vers la porte.
Il ne fera rien pour Helena, personne ne le ferra à part moi. Les puissants s’en sortent toujours.
Je suis à l’hospice depuis une semaine, la vie ici est déprimante. Ils m’ont coupé tout approvisionnement d’alcool, mais j’ai pu garder mon briquet et mes cigarettes, un maigre réconfort. Ce qui me ronge c’est de savoir que le meurtrier de ma petite fille est toujours là dehors, je ne peux pas rester ici.
J’ai fait semblant de prendre mes médicaments, comme ça je ne m’endormirais pas comme une pierre en début d’après-midi. Je me teins les cheveux dans ma salle de bain avec un mélange de ce que j’ai pu me procurer. Puis, je mets mes habits les plus modernes et une casquette.
Je m’approche de l’ascenseur d’où partent d’autres visiteurs et entame une discussion avec eux. Au milieu d’eux, je sors ni vu ni connu, il leur faudra au moins deux heures pour s’apercevoir que je ne suis pas en train de faire la sieste.
Je rejoins à pied la gare où j’avais planqué des affaires au cas où. Mon flair ne m’avait pas trahi, j’ai maintenant de l’argent pour quelques jours, je n’ai plus qu’à me faire discret et continuer mon enquête. Je dois être prudent, mes anciens collègues vont me rechercher. Je marche dans les quartiers louches à la recherche de l’ancienne colloque d’Helena, son immeuble est là, mais soudain une voiture noire s’arrête brusquement entre moi et le bâtiment, la police !
Je prends tranquillement la première perpendiculaire, deux mecs sortent de la voiture et courent vers moi. Je ne cours pas longtemps avant qu’ils ne m’attrapent et me tirent dans la voiture. Ce ne sont pas des policiers. Sûrement les dealers que je cherchais. Personne ne sait que je suis là, ils ont déjà tué Helena pour avoir découvert quelque chose, je me demande même pourquoi ils se donnent la peine de m’emmener.
Je suis assis en face de lui, entre deux gorilles. Il a beau être un homme influent en ville, pour moi il ne sera jamais qu’un dealer et un assassin. Si je suis vivant, c’est juste car il est curieux, ils peuvent me faire ce qu’ils veulent, je ne parlerais pas.
« Qui es-tu ?
– Pourquoi me cherches-tu alors que l’enquête est classée ?
– Que savent tes collègues ?
– Est-ce à cause de la fille que j’ai fait tuer ?
– C’était ma petite fille, réponds-je sourdement. »
Il me regarde de son sourire triomphant. Je connais la vérité maintenant, mais je vais mourir pour ça, le pistolet monte en direction de ma tête.
La porte vole en éclats et mes collègues entrent en trombe.
« Pourquoi ? Comment ?
– Comme si tu allais rester à l’hospice sagement, ironise le commissaire. Je t’ai juste donné le cadeau de départ parfait. »
Je regarde mon briquet, l’inscription prend tout son sens : « Tes collègues qui seront toujours là pour toi ». Un mouchard ! Nous les avions coincés !